Quel bonheur voulez-vous donner à vos enfants? Et qu’est-ce que le bonheur d’ailleurs? Ressentir des émotions plus désagréables comme la tristesse, la peur, la colère, le dégoût serait-il un obstacle au bonheur? Le bonheur, est-ce ressentir de la joie et de la plénitude tout le temps?
Non évidemment. Entretenir un tel idéal met les parents dans une situation de devoir intervenir tout le temps pour protéger l’enfant des inévitables frustrations et contraintes de la vie. Enfermé dans un cocon d’ouate, l’enfant perd le goût de la vie… Il devient taciturne, mais aussi parfois violent, en colère contre ses parents qui lui promettaient le bonheur total qu’il ne parvient pas à ressentir. Colère qu’il peut aussi retourner contre lui-même. Quel mauvais être est-il donc pour ne pas parvenir à être heureux alors que ses parents se plient en quatre pour qu’il le soit!
Pas de bonheur sans tristesse
Donnez à vos enfants la permission d’être tristes
Si le ciel était continuellement bleu, si le soleil brillait de manière continue, avec la même intensité, si la température était toujours la même, très agréable, nous n’aurions même pas de mots pour décrire cela. Nous apprécions d’autant plus un ciel lumineux et la douce chaleur du soleil que nous sortons d’une période plus sombre, plus humide, plus froide. Et nous savons aussi que cela ne va pas durer, donc nous savourons ce temps présent.
Il en est de même dans la vie. A côté des moments de joie partagée, il y a d’autres moments plus gris à traverser. Nous avons des rêves, des idéaux, et puis la vie nous montre qu’il y a des choses inaccessibles, auxquelles nous devons renoncer. Perdre un animal de compagnie, un être cher. Ne pas pouvoir s’offrir l’objet qui nous faisait rêver. Devoir répéter plusieurs fois les mêmes gestes, les mêmes mots pour développer de nouvelles compétences! Prendre le temps de ressentir la tristesse permet de nous ancrer dans la réalité, d’être conscient de nos limites, de celles des autres, et de celles de notre condition humaine. Nous sommes tous mortels! De plus, nous ne pouvons pas être à deux places à la fois. Nous devons donc sans cesse faire des choix. Et choisir, c’est renoncer!
Apprendre à vivre heureux tout en traversant les moments de tristesse
Apprendre à vivre, c’est aussi apprendre à traverser ses tristesses, sans les nier! Donner la permission à vos enfants de pleurer. Offrez-leur votre présence… et votre impuissance. Ils doivent apprendre que vous ne pouvez pas les protéger de tout, que vous ne pouvez pas tout leur donner.
C’est un vrai supplice pour une maman, pour un papa, de voir son enfant pleurer. C’est difficile d’être là sans apporter une solution pour calmer les pleurs. Et pourtant, c’est tellement nécessaire! Sans parler du fait que si vous intervenez dès que l’enfant est triste, il peut utiliser la tristesse pour obtenir tout de vous. Mais c’est encore une autre question.
Le dessin animé “Vice Versa” de Pixar montre la collaboration de la joie et de la tristesse. La joie veut éliminer tristesse, jusqu’au moment où elle se rend compte que lorsque Riley la ressent, tristesse est souvent passée par là.
Apprenez-leur à savourer les petits moments de joie dans le présent! Si vous le faites pour vous-mêmes, ils l’apprendront automatiquement. Aidez-les le soir à retrouver tous les moments où ils ont reçu quelque chose d’autres personnes. Partagez les moments pour lesquels vous ressentez de la reconnaissance.
…et devenir adulte
Enfermer les jeunes dans un cocon familial douillet n’a pas de sens! Certains pensent que si leurs enfants vivent une enfance de rêve, c’est toujours cela de pris. Qu’ils auront bien le temps quand ils seront adultes d’être confrontés aux difficultés de la vie. Sauf que, vivre une enfance dorée, hors de la réalité, ne prépare pas à la vie future. D’ailleurs l’enfant ainsi protégé n’a aucune raison de se projeter dans le futur! La vie des ses parents ne le fait pas même pas rêver. Il ne les suit donc pas dans leurs activités. Il s’enferme dans son univers. C’est d’ailleurs plutôt les adultes qui, dès qu’ils ont un moment de libre, viennent les retrouver pour jouer avec eux.
Pour entrer joyeusement de plein pied dans la vie adulte, le jeune a besoin d’avoir développé certains savoir, savoir-faire et savoir être: la ténacité, l’auto-discipline et l’optimisme, par exemple. Ils devront également être capables de créer des relations harmonieuses, de se remettre en question pour pouvoir trouver et garder leur place dans un monde qui évolue de plus en plus vite.
N’est-ce pas utopique de croire que toutes ces qualités arrivent de manière spontanée une fois que l’on a 18 ans ou que l’on est diplômé?
En tant que parents, n’avons-nous pas le devoir d’éduquer nos enfants, de les sortir de l’enfance pour les conduire à l’âge adulte? Ne devons-nous pas en faire des adultes responsables et autonomes capables d’aimer et d’apporter leur contribution à la société? Dès lors, comment leur donner le sens de l’effort dont ils auront tant besoin?
Comment les préparer?
En confrontant petit à petit l’enfant à la réalité de la vie, les parents l’aident à grandir. Voici quelques réflexions confirmées par de nombreuses études scientifiques.
Les charges contribuent au bonheur de vos enfants
La participation aux charges dans l’enfance est reconnue comme ayant une influence positive sur le niveau de bonheur des adultes. “On n’a rien sans rien”. C’est normal que tout le monde participe selon ses moyens et à sa place au bien-être familial. Tout ne leur est pas dû. Ils ne sont pas nés à la cour du roi soleil mais bien dans une société où l’esclavage a disparu. C’est avec leurs parents qu’ils apprennent à respecter les autres comme des personnes différentes, uniques, ayant leurs propres désirs et besoins, leurs goûts et leurs limites, leurs droits…
La reconnaissance pour plus de bonheur
La reconnaissance a aussi des effets très positifs sur le niveau de bonheur ressenti par les enfants et les adultes. L’enfant qui se rend compte de sa dépendance envers les autres et qui sait dire merci est plus facilement satisfait de sa vie. Le repas est une bonne occasion de se rappeler que si nous pouvons goûter à une telle variété d’aliments, c’est grâce à la générosité de la nature mais aussi au travail des hommes: cultivateurs, artisans, transporteurs, vendeurs… C’est le moment de nourrir une ambiance familiale où chacun peut être reconnu et remercié pour sa contribution.
L’apprentissage
L’enfant doit aussi être confronté à des apprentissages qui soient à sa portée sans toutefois être trop faciles. S’il apprend trop bien à l’école, sans efforts, pourquoi ne pas l’aider à approfondir d’autres matières en dehors de l’école? Un cours de langue, de musique par exemple. C’est important de constater qu’on peut dépasser ses limites. Pourquoi ne pas faire un petit journal avec les apprentissages? Avant de s’endormir le soir, penser à ce qu’on a appris. Au cours de ces apprentissages, cela peut être très utile aussi de montrer à l’enfant qu’il apprend de ses erreurs. Cela lui donnera la permission de ne pas être parfait, et ainsi l’audace de s’attaquer à des matières qu’il ne maîtrise pas.
Sourire et se tenir droit
De nombreuses études ont prouvé les bénéfices de notre posture et du sourire, même forcé, sur notre moral et sur nos aptitudes. Si nous prenons, par exemple, ne fût-ce que deux minutes la position d’un vainqueur, nous augmentons notre taux de testostérone et diminuons le taux de cortisol, hormone du stress. Nous sommes donc plus efficaces dans nos réflexions et nos actions. Inversement, si nous nous replions physiquement sur nous-mêmes, nous augmentons le taux de cortisol et diminuons le taux de testostérone. Nous sommes donc plus inhibés et plus maladroits.
Lorsque j’ai découvert ces résultats d’études à ce propos, je me suis rappelée ma grand-mère. Elle nous invitait à “faire une risette” quand nous étions tristes ou que nous nous étions fait mal et elle exigeait de nous que nous nous tenions droit. Elle n’avait pas tort! Et si nous encouragions nos enfants à se tenir tenir droit et à sourire?
L’enjeu est important
Ne minimiser pas votre rôle d’éducateur. L’essentiel n’est pas d’être aimé de vos enfants mais bien de les éduquer. Si vous ne le faites pas, peut-être vous montreront-ils leur amour aujourd’hui, et encore, c’est loin d’être certain! Mais lorsqu’ils seront adultes, confrontés aux difficultés de la vie, ils vous en voudront de ne pas leur avoir donné les armes pour s’en sortir et ils vous le reprocheront… A moins qu’ils ne vous forcent à continuer à les protéger de la réalité et à les nourrir. Regardez autour de vous. Observez ce qui se passe quand un enfant devient adulescent, qu’il a l’âge d’un adulte mais se comporte comme un adolescent. Cela n’arrive pas qu’aux autres!
Combien de parents, après avoir tout fait pour que leurs enfants soient heureux, se retrouvent sidérés de voir comment ils se comportent non seulement à leur égard mais aussi à l’égard d’eux-mêmes, des autres et de la vie. A ce moment, il est tard, parfois trop tard. Le parent n’a plus les moyens de reprendre le pouvoir. L’enfant roi est devenu un enfant tyran.
Est-ce vraiment votre premier objectif? Le bonheur est-il un but en soi?
N’est-ce pas plutôt la cerise sur le gâteau, la réponse que la vie nous donne lorsque nous sommes droits dans nos bottes, lorsque nous avons fait notre devoir, lorsque nous avons été authentiques, fidèles à nos valeurs, et que nous ressentons la fierté d’avoir respecté nos engagements et d’avoir atteint nos objectifs?
Quelques thèmes traités dans des articles sur Réfl’Actions
Voici quelques articles et livres qui vous permettront d’approfondir votre réflexion pour agir plus consciemment en cohérence avec votre projet de parent: faire de vos enfants des adultes heureux.
Les limites à mettre
Quel bonheur rêvez-vous pour vos enfants?
Méfiez-vous des questions qui vous entrainent à la dérive!
Le parent idéal est tout sauf idéal! Ne placez pas la barre trop haut.
Comment les aider à trouver un sens, la force de vivre et d’avancer?
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Quatre témoignages de vie inspirants!
Quatre enfants-ados rayonnants et plein d’énergie malgré les énormes frustrations que la vie leur a imposées! Inutile de les montrer à vos enfants si c’est pour les culpabiliser et leur reprocher de ne rien faire de bon avec ce que la vie leur donne! Regardez ces vidéos d’abord pour vous, pour vous en imprégnez, et pour vous reconnecter avec la réalité de la vie et vos valeurs. Vos enfants ont besoin de frustrations. S’ils ont “la chance” que la vie ne leur en a pas encore infligés, c’est à vous de leur mettre des contraintes qui les aideront à grandir dans la reconnaissance, dans la joie et dans le respect de leur vie et de celle des autres. Et il n’est jamais trop tôt pour le faire!