La psychothérapie est un moyen, pas un but
Avec la psychologisation de notre culture, aujourd’hui de plus en plus d’humains ont fait de la recherche d’eux-mêmes une priorité. L’œuvre de leur vie serait-elle devenue leur propre personne? Malheureusement, le travail sur soi – sur son humeur, ses émotions mais aussi sur son corps – enferme parfois dans un narcissisme qui coupe des autres. Nous connaissons tous des personnes qui, bien qu’ayant suivi pas mal de thérapies et de formations en développement personnel, sont toujours préoccupées par elles-mêmes et la manière dont elles vont pouvoir s’affirmer.
N’oublions-nous pas trop souvent qu’en tant qu’humain nous avons une responsabilité dans la création du monde de demain. Nous avons des dons, des forces que nous pouvons mettre au service de nos valeurs pour agir dans le monde, pour apporter à nos contemporains une réponse à un de leurs besoins. C’est en agissant de la sorte que nous nous trouvons nous-mêmes.
Personnellement, je me suis laissé entraîner par mon médecin traitant dans une thérapie complètement déstructurante fondée sur la méthode Balint, inspirée de la théorie psychanalytique. Je ne suis malheureusement pas un cas isolé. J’ai rencontré des personnes qui ont consacré 10 ans de leur vie à une analyse qui leur a pris tout leur argent de poche, toute leur énergie, leurs loisirs, leur temps… Ils ont mis leur vie entre parenthèse, en attendant de se trouver…
A quarante ans, Anne se rend compte que le temps a passé. Elle n’a pas construit de foyer. Elle s’est toujours contentée de petits boulots qui collaient à ce qu’elle aimait pour payer son analyse. Elle n’avait pas de projet professionnel, ni familial. Victime d’une mère alcoolique et d’un père violent, elle s’était toujours battue pour s’occuper de ses petits frères et soeurs. Généreuse, idéaliste, elle aimait rendre service. Elle a entamé une analyse après une déception amoureuse. Cette analyse a duré 13 ans et Anne qui n’en voyait pas la fin a déménagé à 100 km de son lieu d’origine pour savoir se passer de son psy. Chômeuse, elle a pu reprendre des études d’institutrice et elle a rencontré un compagnon qui l’aime comme elle est et qui la respecte. Il a deux enfants qu’ils éduquent ensemble. C’est l’amour de cet homme qui l’a aidé à ouvrir les yeux et à supporter la douleur de cette réalité.
“Après cette thérapie, il m’a fallu des années ans pour me “reconstruire” comme disent les psys. Moi je dis pour me retrouver. Car finalement, les forces et les valeurs qui étaient les miennes il y a 15 ans sont toujours les mêmes aujourd’hui. Ce que l’on a voulu soigner en moi est toujours là en moi. Je peux en faire une force, une spécificité! La recherche du plaisir n’est pas mon principal moteur! Et alors? Est-ce si évident qu’il faut absolument savoir se faire plaisir en consommant? L’argent n’est pas ma principale motivation. Je n’aime pas faire les boutiques. Je mets toujours les mêmes vêtements. Je roule dans des voitures d’occasion. Je vis avec peu. J’aime faire plaisir, rendre service, apporter du bonheur… Est-ce vraiment à cause de mon passé? N’est-ce pas plutôt mon tempérament, ma personnalité qui m’a permis de traverser mon enfance avec courage et d’être une grande soeur modèle? Pourquoi ne pourrais-je être fière de ce que j’ai été dans de pareil circonstance? Pourquoi mon psy n’y a-t-il vu que du pathologique plutôt qu’une force de caractère? En tous les cas, il n’est pas parvenu à me guérir de mon côté “sauveur” et je continue aujourd’hui, sans culpabilité – contrairement à la période où je me “soignais”. Quand je vois les gens autour de moi “bien dans leur peau” selon le critère culturel, je n’ai pas envie de guérir.”
Comme Anne, j’ai aussi mis du temps pour retrouver la personne que j’avais toujours été et pour accepter de vivre la seule vie que je pouvais vivre, la mienne. Je suis convaincue qu’avec très peu d’éléments et surtout avec un regard positif sur qui j’étais à ce moment-là de ma vie, j’aurais pu évoluer plus rapidement et de manière plus cohérente avec ma propre personnalité.
Les mots qui entrainent dans une longue thérapie
Si vous racontez à votre psy les problèmes qui vous préoccupent ou les traumatismes que vous avez subis et qui vous reviennent sans cesse, il vous dira sans doute quelque chose comme “C’est normal que vous vous sentiez mal après tout ce que vous avez vécu ou dans la situation qui est la vôtre”. Cette reconnaissance à elle seule vous soulagera déjà. A ce moment, il pourra vous convaincre plus facilement que pour ne pas faire de rechute et vu la gravité des choses dont vous avez souffert, vous devez faire un travail profond et sérieux et notamment comprendre les raisons de votre comportement. Il vous conseillera au cours d’une psychothérapie de voir ce qui dans votre passé a fait de vous cette personne qui n’a pas su mettre de limites et qui a accepté de vivre tout cela?” Au lieu de voir toutes les qualités qui vous ont permises d’être où vous êtes aujourd’hui, il verra dans ces qualités des défauts qui vous ont permis de dépasser vos limites.
Une vocation
Suite à cette expérience personnelle de thérapie qui a provoqué un tsunami dans ma vie, j’ai voulu comprendre ce qui m’était arrivé. Je me suis battue pour reconstruire. La descente aux enfers ne prend que quelques mois. La remontée prend des années.
J’avais la capacité de mettre à la portée de mes élèves des théories complexes. C’est une force, un don chez moi. Je l’utilise aujourd’hui pour mettre à la disposition de ceux qui me consultent ou qui me lisent les outils qui leur permettront de reprendre rapidement et naturellement leur vie en main. Je veux être efficace, c’est-à-dire trouver dès la première séance les mots et les images qui permettront à mes clients de continuer à évoluer par leurs propres moyens, en s’appuyant sur leurs propres ressources ! Je veux les aider à partir de ce qu’ils sont aujourd’hui, ici et maintenant… sans attendre d’être quelqu’un d’autre.
Efficacité ne veut pas dire qu’on peut résoudre tous les problèmes! Cela suppose souvent d’accepter les faits, ce qui ne changera pas, nos limites, celles de nos proches et prendre des décisions en fonction de cette réalité plutôt que de se battre des années contre! Combien de couples, par exemple, finissent par rompre après des années de thérapie, de formations… des années de souffrances, de violence psychologique durant lesquelles chacun s’est efforcé de faire changer l’autre? Tout ce travail avait-il vraiment un sens?